Le vieux qui lisait des romans d’amour. Luis Sepùlveda

Luis Sepùlveda partage ici, un bout de son histoire dans l’histoire qui suit. Le titre est intriguant de prime abord, métonymique tant l’amour enveloppe ce récit. Il parle de Antonio José Bolivar, un blanc ayant épousé la culture Shuar, peuplade libre dans l’Amazonie péruvienne. Recueillit et sauvé d’une mort certaine, José Antonio fut accepté comme un frère de la forêt tant il fit preuve de curiosité, de respect et d’adaptation à leur culture. Pourtant il ne serait jamais l’un des leurs car le sang les sépare. Bien des années plus tard, José Antonio commet une maladresse culturelle qui le pousse à retourner près des blancs. Exilé en bordure de village, il apprend à lire et se passionne pour le sentiment amoureux.
« C’était l’amour pur, sans autre finalité que l’amour pour l’amour. Sans possession et sans jalousie. Nul ne peut s’emparer de la foudre dans le ciel, et nul ne peut s’approprier le bonheur de l’autre au moment de l’abandon. »
Sepùlveda donne de lui-même dans José Antonio. Comme il l’explique en post face de cette édition, il a vécu un bout d’aventure comme José Antonio, dit « le vieux ». Ses connaissances de la jungle amazonienne sont particulièrement poussées et relèvent de la culture pragmatique des peuples y vivant en harmonie. Sepùlveda déroule une étendue de savoirs qui donnent du relief au livre. Pourtant il y a bien une histoire derrière, toute aussi intéressante avec la traque d’une femelle jaguar devenue furieusement vengeresse après avoir vu sa famille se faire décimer par l’homme blanc. Le vieux se désole de devoir participer de force à cette battue tant il désapprouve la civilisation qui l’a vue naître. S’engage alors une aventure, plus profondément dans l’Amazonie ; plus encore loin dans la tête du vieux aux sentiments amoureux.
----------- Attention spoiler, dernier paragraphe du livre -----------
« Antonio José Bolivar ôta son dentier, le rangea dans son mouchoir et sans cesser de maudire le gringo, responsable de la tragédie, le maire, les chercheurs d’or, tous ceux qui souillaient la virginité de son Amazonie, il coupa une grosse branche d’un coup de machette, s’y appuya et prit la direction d’El Idilio, de sa cabane et de ses romans qui parlaient d’amour avec des mots si beaux que, parfois, ils lui faisaient oublier la barbarie des hommes. »