Sur ta tombe. Ken Bruen
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Revoilà Jack Taylor, le personnage iconique de Bruen, toujours alcoolo et encore plus amoché que d’habitude. Affublé d’une pate folle, d’un sonotone, de profondes cicatrices et très rapidement délesté de quelques doigts, notre anti-héros galvien traîne dans son sillage un amoncellement de cadavres. Pour faire face il y aura toujours une pinte de Guinness et un chaser Jay, en double quand le mal darde trop puissamment. En attendant, le bonheur s’est invité dans sa vie : depuis peu Jack est amoureux de Laura, une écrivaine américaine qui le rend heureux.
« Mon penchant pour la bouteille ne lui avait pas échappé (d'ailleurs, comment aurait-il pu ?), mais Laura avait foi en ma bonne étoile. Et je me suis, moi aussi, laissé bercer par cette illusion. Même s'il était couru que je ferais tout capoter. Aussi sûr qu'il y a du granit sur les murs de la cathédrale de Galway. Cela dit, si c'était le dernier jour que je devais passer au soleil, j'avais bien l'intention d'en profiter un max. »
Taylor est, comme toujours, à Galway et Laura à Londres. C’est seul qu’il se voit confronté à de nouvelles violences. Ça commence par l’agression du père Malachy, l’ancien confident de sa mère. Les deux hommes se vouent une haine infaillible mais il ne faut pas toucher aux proches. Ridge, la Ban Garda, tout comme Stewart, ex dealer reçoivent en même temps que Jack des menaces de mort. Taylor n’est plus ban garda (flic), il évolue en marge sans licence mais un groupuscule de l’Église (les Brethren) lui propose une juteuse affaire.
« Qu'est-ce que je ne donnerais pas pour être le gars qui pose sur la pub Prozac, un perpétuel sourire béat aux lèvres, et voir ma tronche sur les flacons »
Tandis qu’il résout rapidement la disparition du père Loyola partit avec la caisse noire des Brethren, un groupe de jeunes bourgeois néo-gothiques planifie une tuerie de masse. Ces cinglés qui ont lu Darwin de travers projettent d’exterminer ceux qu’ils qualifient de rebus à Galway : handicapés, SDF, marginaux, homos, alcoolos, dealers, … La violence prend place au fil des pages et des bières éclusées par Jack.
« Une Gothique était attablée au fond du café. J'ai toujours eu un faible pour ces êtres-là. Ils sont inoffensifs, font leur truc à fond en se foutant du ridicule et vouent un culte indéfectible à The Cure. »
Le portefeuille bien rembourré suite à la résolution de sa première affaire, Jack fait le plein habituel de livres, DVD, et bières. Il fait le bien autour de lui, parfois auprès d’inconnus. Une vision du monde sans lendemain avant que tout ne s’écroule de nouveau. À Galway il est connu de tous et dispose d’un badge de pilier de comptoir partout où il passe. C’est d’ailleurs dans les pubs qu’il pêche le plus d’informations.
« Mais qu'il soit alcoolique au dernier degré et, elle le soupçonnait, accro à pratiquement toutes les substances illicites en circulation, n'y changeait rien : le jour où vous vous retrouviez le dos au mur, c'était vers cette épave vieillissante à moitié sourde et affligée d'une patte folle que vous vous tourniez. »
Un Taylor en pièces n’est pas un Taylor mort, bien au contraire. Jack est toujours partant pour aider ses amis et combattre les salauds. Avec une morale et des failles tout aussi humaines, c’est un personnage très attachant qui dispose d’une répartie de sniper des mots. Cynique, anticlérical mais fiable, il prend des coups sans broncher avec toujours une note d’humour noir. Indestructible Jack !
« Aujourd'hui encore, je n'en sais foutre rien. C'est un des grands paradoxes de l'alcoolisme. On boit pour oublier, mais on n'a qu'une hantise : que ça arrive. Les Brits ont un terme savant pour décrire ça : conundrum. »