Knulp. Hermann Hesse

Publié le par Tactile

« Le vagabond se laissait envahir par la douceur de la nuit, il la goûtait par toutes les fibres de son corps et la respirait à longs traits ; il pressentait le retour du printemps, de la chaleur et des longues randonnées sur les routes sèches. »

Hermann Hesse raconte la vie de Knulp, vagabond de toute une vie dans l’Allemagne du début du 20° siècle. Ce héros peu ordinaire a écumé les routes de son pays, parcourant en dilettante les chemins, vivant de peu et acceptant volontiers la charité des gens. Car Knulp est un personnage connu et apprécié, tous aiment sa présence, le gîte et le couvert lui sont facilement accessibles.

« On peut se permettre d’observer les hommes, de rire de leur sottise ou d’en avoir pitié, mas il faut les laisser libres de suivre leur chemin. »

Lorsque fatigué et malade Knulp décide de prendre le dernier chemin qui le mènera chez lui et au-delà, c'est une façon de boucler la boucle et de faire le point sur sa vie. Auprès de ses semblables il fait preuve de beaucoup de finesse, d’intelligence, de savoir-vivre et on le remarque pour ses pensées éclairées.

« Knulp dit que nul ne peut mêler son âme à l’âme d’un autre. Deux êtres peuvent aller l’un vers l’autre, parler ensemble mais leurs âmes sont comme des fleurs enracinées, chacune à sa place ; nulle ne peut rejoindre l’autre, à moins de rompre ses racines : mais cela précisément est impossible. »

Au fil de ses errances Knulp a tissé des liens avec de nombreuses personnes, découvert de nombreux métiers, vu de nombreux paysages mais il reste un solitaire qui ne s’est jamais attaché à quiconque ni nulle part. Cette liberté émerveille ses interlocuteurs tout autant qu’elle lui est reproché. A quoi bon gâcher tous ses talents à ne rien en faire ?

« Mais parce que je les ai aimées toutes les deux et que j’ai voulu les faire miennes, elles se sont transformées pour moi en une seule créature de rêve ressemblant à l’une et à l’autre, bien que n’étant ni l’une ni l’autre. Cette créature m’appartient, à moi seul, mais elle n’a plus rien de vivant. »

Knulp questionne ses contemporains sur la vacuité d’une existence de labeur mais aussi sur les inconvénients d’une vie de bohème. Lui a préféré la rêverie et la liberté aux conventions sociales ainsi qu'au relatif confort associé. L’histoire fini par révéler ce qui a poussé cet être hors du commun sur les routes de Cocaigne.

« Tu sais que j’ai toujours eut des engouements : quand j’avais fait une nouvelle découverte, plus rien au monde ne comptait sur le moment. »

Sensibilité, finesse et observation sont les aspects qui transpirent le plus de l’écriture de Hesse. Il y a comme de la tendresse envers ce beau vieillard à l’aube de sa mort et ce roman en forme de bilan pèse le pour et le contre d’une existence d’errance. Nulle doute que Knulp, au même titre que Le loup des Steppes (à lire sur ce blg) a inspiré un siècle d’écrivain beatnik.

« J’ai eu bien des amis, des relations, des camarades et même des amours ; mais je n’ai plus jamais fait confiance à personne ni ne me suis engagé envers quiconque. Plus jamais. J’ai mené la vie qui me convenait, j’ai eu ma part de liberté et de beauté, mais je suis toujours resté seul. »

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