Roubaix 70’s : itinéraire d’un flic ordinaire. Luc Watteau
/image%2F1622379%2F20220921%2Fob_3db07d_roubaix.jpg)
Roubaix 70’ est écrit par un vrai flic, du point de vue d’un flic. Placez-vous dans les années 70’ dans le Nord Pas de Calais et vous avez le contexte. Tout est dans le titre ! Le protagoniste, Franck Malmaison est un lieutenant de police roubaisien, ordinaire, pas avare de bons mots ni d’intuitions audacieuses. On le suit lui et ses potes, flics, à travers un quotidien qui se répète comme une revue d’armes. La plupart des affaires sont banales, vols à la tire, violences conjugales, petits trafics et extorsions, seules certaines sortent du lot et font appel aux vifs instincts policiers.
Plongé dans cette immersion chez la flicaille, on accède à un microcosme de joyeux potaches ultra solidaires et qui passent plus de temps entre eux qu’avec leur famille. Tous sont affublés de surnoms et leur travail est principalement constitué d’administratif, de saisie de procédure, de comptes rendus, et de courriers de convocation ; rien de bien épique et c’est ce que Watteau a voulu montrer. Ce qui frappe c’est le fossé qui scinde police et justice, parfois même : ennemis souvent désunis.
« - Avant ça se passait bien car on ramait tous dans le même sens. Maintenant, les types qui sont aux manettes sont des anciens de 68. Ils ont 35 ans et commencent à avoir des postes à responsabilités. On ne peut rien y faire. – Qu’est-ce que ça va donner dans quinze ans ? – Je ne sais pas. Peut-être qu’on aura des avocats tout au long de la garde à vue, peut-être qu’il faudra des mandats pour faire des perquis’, peut-être même qu’il n’y aura plus de bars dans les commissariats. – Ah ça je le crois pas ! »
Un beau jour survient la disparition d’une fillette de 7 ans et là tout se bouscule pour Franck qui s’implique immédiatement dans cette enquête qui lui volera ses nuits. Assez tôt se dégage un suspect bien étrange. Après un coup de filet plutôt malin et borderline avec la procédure, Franck et ses potes se mettent à cuisiner le type qui avoue avant de se mutiler. Alors la Justice et le procureur s’en mêlent et le pédophile est relâché pour s’évanouir dans la nature. À Franck de recoller les morceaux.
« Faisant volte-face, je remonte en 4L pour rentrer à la boutique. Il m’a bien gavé ce con ! Je pense que je vais boire un bon verre, ce midi… de rage ! »
Ce récit est intéressant car il est le témoignage d’un quotidien de vrai flic. Pas celui d’un héros déconnecté comme la plupart des romans noirs, non, lui est réaliste, il n’élude rien des problèmes tels que les abus d’alcools, les encarts à la procédure, le lien difficiles avec sa famille, l’ennui généré par l’administratif et surtout le lien délétère avec la Justice. Rajoutez à tout ça un récit rythmé, des bons mots, des vannes à ne plus en finir : il y a un vrai style, jusque dans l’argot qui fleure les années 70, ce livre de Watteau est une réussite !