Un profil perdu. Françoise Sagan
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Josée et son mari Alan Ash vivent les dernières heures d’un amour passionnel ; volcanique. Lors d’une réception mondaine chez la volubile Mme Debout, le scandale éclate et un riche homme d’affaire, Julius A. Cram vole au secours de la belle Josée dont il va prendre soin. Rien ni personne ne s’oppose à la volonté du magnat de la finance, ni Mme Debout et sa cohorte de laquais, ni Alan, seule Josée résiste au petit numéro de son nouveau protecteur.
« Et puis, en trois ans, mes amis avaient changé, ils avaient maintenant des préoccupations de métier, d'argent, qui n'étaient pas encore les miennes et qui, à mes yeux de privilégiée, les transformaient de compagnons de fête en petits ou grands bourgeois. Ils avaient opéré sans moi le virage de la maturité et j'étais revenue parmi eux encore adolescente, parce que flanquée d'un autre adolescent, oisif et riche, nommé Alan. »
Débarrassée de son mari, Josée se retrouve néanmoins fort démunie et doit s’assurer une existence indépendante. Julius A. Cram va l’y aider. Il lui fournit un appartement, un travail très bien rémunéré, des sorties et des vêtements de couturier. Josée trouve dans sa nouvelle vie une forme d’épanouissement professionnel mais elle semble toujours manquer de quelque chose.
« Je ne sais pas s'il vous aime, mais en tout cas, il veut vous tenir, dit-il. Julius est l'homme le plus possessif qui soit. Je poussai un affreux soupir et avalai le reste de mon whisky. Décidément, je jouais un rôle de gibier sur cette terre. J'en avais assez. »
Belle jeune femme désirée de tous, Josée refuse les avances de Julius et rapidement, elle tombe de nouveau amoureuse. C’est avec Louis, le frère de son ami Didier Dalet qu’elle va vivre une romance intense qui semble la métamorphoser. L’écriture de Sagan prend alors une autre couleur et devient très lyrique. L’amour nourrit une écriture poétique qui contraste avec le début d’un roman plutôt rêche et avant tout fournit de dialogues.
« Une seconde, tout s'arrêta, tout se photographia à jamais dans ma mémoire sensible, puis la main de Louis se déplaça sur le volant et nous recommençâmes à vivre. »
Plus le livre se teinte de rose, plus on avance dans l’introspection et la conscience de soi. Josée semble se redécouvrir, elle qui a toujours fuit tandis que tous les hommes rêvent de la posséder. C’est d’ailleurs, à mon avis, le thème de ce roman de Sagan : la possession et la fuite qui sont le sort de toutes les belles femmes convoitées.
« Visages ravagés de l'amour, planètes de cendres pétrifiées, avec les mers muettes et liquides des regards échangés et le gouffre des lèvres closes ; le battement bleu des veines à nos tempes était un indécent anachronisme, le souvenir entêté d'un temps où nous avions cru exister, aimer, dormir et où pourtant nous ne nous connaissions pas encore. Et j'avais cru avant lui que le soleil était chaud, la soie douce et la mer salée. J'avais rêvé si longtemps, j'avais même cru vieillir et je n'étais pas née. »